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En vers et contre toute autre formule, le poème se fait la rime aux rebords de mots qui dansent. Prose poétique juste harmonieuse, le poème peut s'habiller aussi de verbes plus grinçants, d'assonnances ou de refrains. Pas de quoi se froisser la lecture ; le poème reste un assemblage de lignes taillées dans une verve sans soupirs. Il s'y respire la sentence, qu'un sonnet, un quatrain, une nuance, suffisent à s'adonner au genre.

Voyage au coeur du poème avec :

Marie-Thérèse Barbier prince du sonnet
rimes visuelles

 

 


 

pour être sauf


Sauf la terre en épilogue, il me faut tout.
Tout de ton ventre et d'uranus, hormis l'hiver et tes refus.
Sauf la rage de novembre si elle épuise nos baisers, il me faut tout.
Sauf l'écueil, sauf la pluie quand tu t'enfuis si loin de nous sans retenue.
Sauf l'après, les cependant, sauf le vent des subjections, sauf l'ennui.
Sauf aux dépens de ton grandir il me faut tout, tout réunir.
Sauf à s'aimer de convenance, sauf à saillir nos allégeances,
sauf à sôter...
il me faut oublier le temps.

Sauf la mer en catalogue, il me faut tout.
Tout de ton antre et de venus, hormis l'automne en consensus.
Sauf l'orage de septembre s'il indiffère nos années, il me faut tout.
Sauf l'orgueil, sauf la nuit quand tu endors nos envies, à demie nue.
Sauf aux élans de ton partir il me faut tout, tout réussir.
Sauf à s'allier de négligence, sauf à faillir dans l'obligeance,
sauf à t'oser...
il me faut oublier le temps.

 

L

C'est le tempo que je préfère, son rythme coeur, ma lettre douze.
A mon oreille c'est éternel, cordial aimant, mon meilleur blues.
J'ai mis mes sens en son essence, j'entends sa frappe qui me bat la transe.
Ses pulsations me font des frissons, j'écris plus que ça, ma lettre douze.

C'est L, c'est lui, c'est elle
Sait-elle qu'elle luit, je lui dis ma belle.

C'est le duo que je préfère, mon corps à coeur, ma lettre douze.
On s'ensommeille, on se réveille, on s'métronome, c'est sensuel.
Elle m'envisage sans nuage, j'entends sa frappe, s'suis son orage.
Ses pulsations me donnent le ton, je crie plus que ça, ma lettre douze.

C'est L, c'est lui, c'est elle
Sait-elle qu'elle luit, je lui dis ma belle.

 

"se manger ","pour être sauf ", "L", "reproduction", "qu'elle et moi" et "reminiscence" ont été publiés dans Prose & Poésies à mille mains aux éditions l'ill graphique - dépôt légal oct. 2003

reproduction

Un et un font rien
ou peut-être plus qu'un.
Pour faire plus d'un...
sans s'y soustraire ils s'multiplient.
Ils font un de plus !

Un et un font d'eux
le produit fou qui les divise.
Puis encore un, et je retiens rien.
Un et un font deux
Deux et deux font rien,
et même pis, font moins que rien.

 

Qu'elle et moi

Je ne sais peindre que toi
Ta main sur mes ombres et ta bouche à mes nuits.
Je ne sais peindre que toi
Ton front nacre mes ocres, ton sourire mes pigments.
Il se peut que j'esquisse l'abord de ton cou
s'il se peut que j'esquive
tes regards tes atouts.

Au pinceau de mes bises sur tes traits attendris
je t'entoile les gouaches et c'est un beau dessein.
tes épaules m'applombent l'attention de tes bras
au fusain d'un je t'aime qui me dit tout tout bas.
Je ne sais peindre que toi
Je ne sais... que l'émoi.

reminiscence

Il n'y a lieu de se réjouir de rien. Ni de la cour laissée vide par les enfants qui ont grandi, ni de l'automne qui fait tomber les fruits. Tout est bien là pourtant, la rue de nos baisers, un vent de mimosa, la baie de nos étés.

Au pont que tu aimais, ne tient plus la rambarde qui te glaçait les mains. Quitte à lasser demain, je referai par coeur tout ce qui est détruit. Marchons encore veux-tu au feu de ton allure grisant ma promenade que je fais sans tes pas.

Si tu voyais mon ciel, il a l'écume belle qui te faisait danser; il a des brumes blêmes, il a les lunes même au lieu de mon ennui.
Il me semble devoir corriger ma mémoire si je veux te penser.


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